« Apprendre à décider »
Episode 2 : Comprendre l’incertitude
L’incertitude constitue par construction l’environnement général de la prise de décision.
La définition du terme est la suivante :
« Ce qui ne peut être connu, déterminé à l’avance. Ce qui ne peut être établi avec certitude, qui laisse une place au doute ».
Dans le domaine de la prise de décision, cette définition me semble incomplète, car elle ne s’inscrit pas dans le cadre de l’accomplissement d’une mission. Or pour le leader c’est bien l’absence de certitude et l’omniprésence du doute qui caractérisent en permanence l’analyse de son environnement pendant l’élaboration de sa prise de décision, notamment en fonction de la valeur et de la sensibilité de l’enjeu recherché.
En situation de crise, l’incertitude concerne ainsi, à des degrés différents, l’ensemble des domaines analysés par le leader pour définir la solution qui présidera à sa décision, puis son action. Si tout était connu, décidé à l’avance, l’existence du leader ne présenterait aucune nécessité. A l’évidence ce n’est pas encore un sujet.
Il y ainsi l’incertitude globale à laquelle il faut faire face : elle caractérise la connaissance forcément incomplète des facteurs qui caractérisent le problème qu’il faut régler. Mais il y a simultanément aussi l’incertitude que l’on crée : quand on y réfléchit, on réalise en effet que le leader n’a pas d’autre choix que de créer son propre mal : l’incertitude génère la nécessité d’une décision, qui vise à provoquer une action, destinée elle-même à diminuer ou contenir le niveau d’incertitude du moment afin de progresser sur la voie du succès. Mais cette action devient alors elle-même génératrice d’incertitude :
En prise de décision, tout est incertitude, changement, enjeu et risque. Partant du principe que l’incertitude ne peut jamais être supprimée, le quotidien du leader est donc de pouvoir décider en connaissance de cause pour engager une succession d’actions destinées à diminuer ou maîtriser temporairement le cadre d’incertitude général dans lequel il évolue, afin d’obtenir une série de gains lui permettant de continuer d’avancer dans la direction qu’il s’est fixée pour chercher à accomplir sa mission. Voilà pourquoi selon moi on parle de gestion de l’incertitude en prise de décision.
L’incertitude porte en effet sur plusieurs domaines intrinsèquement liés en prise de décision. Après avoir évoqué l’incertitude (au singulier) il faut donc parler d’incertitudes (au pluriel) :
– incertitude de mon analyse de la situation :
La qualité de mon analyse ne vaut que par ma rigueur et mes capacités en la matière. Je ne suis jamais sûr d’avoir appréhendé de manière exacte et exhaustive la situation dans laquelle je me trouve, surtout sous haute intensité.
– incertitude de mon intention :
Je ne suis jamais tout-à-fait sûr d’avoir tiré les bonnes conclusions de mon analyse, ni donc assuré que je ce que j’ai l’intention de faire est complètement adapté au règlement de la situation à laquelle je fais face.
– incertitude de la nature de ma décision et de mon action:
Je vous renvoie à l’épisode 1 « acquérir le sens des nuances ».
– incertitude des conséquences de mon action et des résultats que j’en attends :
Je ne suis jamais certain que mon action se déroulera comme prévu, ni que ses conséquences seront exactement celles que j’attends pour continuer d’avancer.
Je vous propose en conclusion deux définitions personnelles :
Incertitude :
« L’incertitude caractérise, quel que soit mon environnement, mon incapacité naturelle à maîtriser totalement et en permanence l’ensemble des paramètres touchant à la réussite de ma mission ».
Gérer l’incertitude :
« Généralement sous haute intensité, dans un cadre espace-temps instable, chercher à maîtriser suffisamment et à un moment donné les paramètres de mon environnement afin de créer les conditions permettant la prise des décisions successives que je veux engager pour au final accomplir ma mission. »