Donald Trump, homme d’affaires et ancien président des États-Unis, met souvent en avant ses compétences en négociation. Il a même écrit un livre à ce sujet : The Art of the Deal. Cependant, une analyse plus approfondie révèle que sa réussite repose moins sur l’art de la persuasion que sur l’utilisation d’une position de pouvoir lui donnant un rapport de force favorable. Les pratiques qu’il utilise sont à bannir au sein d’une entreprise.
En tant qu’homme d’affaires ou président des Etats-Unis, Donald Trump a toujours été fidèle à lui-même. Il a toute sa vie appliqué les techniques de négociation commerciale décrites dans son livre The Art of the Deal, paru en 1987. Lors d’une négociation, il procède en trois étapes, comme l’explique Laurent Combalbert, fondateur de TTA:
- Il commence par modifier unilatéralement les conditions d’un accord déjà signé ou en passe de l’être. « La pire chose que l’on puisse faire dans une transaction, c’est de donner l’impression que l’on veut absolument la conclure. Cela fait sentir à l’autre l’odeur du sang, et alors vous êtes mort », écrit Trump dans son livre.
- La situation se crispe et, pour rouvrir les négociations et revenir au statu quo initial, il demande au partenaire de faire une concession.
- Pour cela, il commence avec une exigence volontairement très haute, puis accepte de rogner sur cette nouvelle exigence à condition que son partenaire lui donne quelque chose. Il adopte une posture très dure, et n’hésite pas à utiliser les médias: « Une chose que j’ai apprise au sujet de la presse, c’est qu’elle est toujours avide d’une bonne histoire, et que plus elle est sensationnelle, mieux c’est… Le fait est que si vous êtes un peu différent, un peu scandaleux, ou si vous faites des choses audacieuses ou controversées, la presse va écrire sur vous”, relate-t-il. De cette façon, Trump provoque un effet de surprise, et la partie adverse ne se rend même pas compte qu’elle est déjà en train de lui céder.
La stratégie du « couteau sur la nuque »
La méthode de négociation adoptée par Trump est essentiellement une stratégie du « couteau sur la nuque » ou du « revolver contre la tempe ». Il privilégie l’usage de la pression et de la puissance au lieu de favoriser la coopération et le consensus, et n’est pas réticent à adopter délibérément des positions officielles extrêmes pour soutenir une politique économique calculée. Cette tactique consiste à établir un rapport de force avantageux, souvent aux dépens de l’autre partie, instaurant ainsi une dynamique où le « vainqueur » domine le « vaincu ».
L’incident diplomatique entre la France et les États-Unis concernant la taxation de produits américains illustre parfaitement la stratégie du « couteau sur la nuque » dans les négociations internationales. La France, souhaitant imposer des taxes sur certains produits américains, s’est heurtée à une réaction ferme de l’administration américaine. Lorsque les conseillers ont informé le président Trump de l’inflexibilité de la position française, il a réagi en menaçant de sanctionner le vin français, produit emblématique et crucial pour l’économie française. La résolution de cet affrontement est venue d’un appel d’urgence du président français Emmanuel Macron à Trump, lors duquel Macron a finalement décidé d’abandonner la proposition de taxer les produits américains.
Considérée sous l’angle des bénéfices immédiats, cette méthode peut s’avérer rentable, comme le démontre la fortune de Trump. Les avantages à court terme de cette approche surpassent fréquemment ceux d’une démarche plus conciliante. Toutefois, une telle stratégie peut endommager, voire anéantir, les relations futures avec la partie adverse. Les partenaires deviennent réticents à l’idée de conclure de nouveaux accords ou se mettent en quête d’alliances alternatives pour contrer la domination établie. En résumé, bien qu’efficace à court terme, la méthode de Trump est préjudiciable sur la durée.
Face à une telle stratégie de rentre dedans, il est crucial d’élaborer des arguments clairs et convaincants pour rétablir un équilibre des pouvoirs. C’est la réponse adoptée par les Chinois face aux taxes imposées sur leurs produits : ils ont menacé de réagir en taxant des produits tels que le soja, la viande de porc, ou des fruits américains. Résultats: les négociations se sont enlisées.
Sans éthique, pas de bonne négociation
Une caractéristique cruciale des bonnes négociations est l’éthique. “La négociation est éthique par nature”, appuie Laurent Combalbert. “Les parties prenantes qui font l’effort de chercher à s’entendre pour résoudre leurs désaccords en élaborant un accord juste ont un intérêt évident à être éthiques.” Dans cette perspective, Trump est un mauvais négociateur. Sa méthode, centrée sur l’avantage et le gain personnel, démontre un manque de considération pour les intérêts mutuels ou les conséquences à long terme sur les relations. De plus, cette tactique manque de la finesse et de l’art de la persuasion, qui sont essentiels dans les négociations équilibrées et respectueuses.
Trump n’est malheureusement pas le seul à utiliser des pratiques non éthiques. “Selon les informations que l’on partage avec l’ONU, 90% des négos sont désormais compétitives, 10% seulement sont dites coopératives”, explique Laurent Combalbert. Le contexte actuel, dans le monde de l’entreprise comme dans les rapport entre Etats, est favorable à ces crispations : inflation, guerres, pénurie des ressources, réchauffement climatique, concurrence économique accrue ou encore à une montée du chômage sont autant de facteurs qui contribuent à l’accroissement des tensions entres parties prenantes.
Sur le terrain, cependant, les entreprises qui soignent la relation à long terme avec leurs partenaires s’en sortent mieux que celles qui les pressurisent en leur imposant des conditions invivables. Tant sur le plan financier qu’en matière de réputation et de marque employeur, la coopération et le respect des partenaires commerciaux sont donc préférables.
En conclusion, Donald Trump, parfois perçu comme un maître de la négociation, emploie en réalité des tactiques basées sur le rapport de force et la menace. De ce fait, il est le parfait représentant d’un capitalisme d’opportunité qui écrase les autres pour s’enrichir. Les stratégies non éthiques (menaces, ultimatums, etc.) peuvent parfois apporter des succès immédiats, mais elles présentent des risques significatifs sur le long terme : elles entachent la négociation d’une image négative, sapent la confiance des partenaires et nuisent à la crédibilité à long terme de votre entreprise.